| Un matin le printemps est sorti
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| De son lit pour aller faire la vie
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| Et pour repeindre en bleu tout le gris
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| Qui traînait sur les murs de Paris.
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| Du gris, il y en avait dans ma vie,
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| Mais ce jour-là, mais ce jour-là,
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| D’un seul coup, tout fut repeint en bleu,
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| Le ciel et les yeux des amoureux.
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| Du coup, pour le Pont-Neuf et la Seine,
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| Ce fut l’heure pour eux d’entrer en scène.
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| Sur ce pont, nous nous sommes croisés.
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| Moi, ce jour là j’allais tout droit,
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| Droit devant moi, vers je ne sais quoi…
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| Rappelle-toi…
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| Des jonquilles, 'y en a eu par milliers.
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| On savait où aller les chercher.
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| Qu’ils sont chauds, les prés au mois de mai.
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| Qu’ils sont hauts, les blés au temps d’aimer.
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| Qu’ils sont beaux, les mots que tu disais:
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| «Je suis à toi… Je suis à toi.»
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| Ces mots-là, on ne s’en lasse jamais.
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| Ils sont faits, semble-t-il, pour durer.
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| J’aimais t’entendre les murmurer,
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| D’autant plus que pour moi ils semblaient vrais.
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| Pour moi-même, ne t’ai-je pas crié:
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| «Je suis à toi… Je suis à toi
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| Mais garde-moi et serre-moi tout contre toi…»
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| Un matin, l'été a fichu le camp
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| En laissant en souvenir du printemps
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| Des feuilles qui virevoltent au vent
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| D’un automne qui ne prend pas de gants
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| Pour venir me dire à bout portant:
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| «Je suis à toi…»
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| Aujourd’hui, les beaux jours sont sortis.
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| C’est fini, ils ont quitté Paris.
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| L’hiver va revenir mettre en gris
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| Tout le bleu que notre amour y avait mis.
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| Du gris, mon Dieu, qu’y en a dans ma vie.
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| Je suis à toi… Je suis à toi…
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| Mais reviens-moi comme autrefois…
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| …Je suis à toi… |