| Homme, ami, frère
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| En ce soir d'été, la trentaine érige l'évidente beauté
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| Le soleil engorge ta peau d’un sang qui bouillonne
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| Encore un peau et ton cuir pourrait fendre
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| Comme un fruit éclaté de sucre et d’ambre
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| Homme, ami, frère
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| En ce soir d’ivresse, l’allègre amitié s’alourdit de tendresse
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| Et sur le ton que prennent les vieux copains de peine
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| Les yeux saouls et le sourire qui se mord
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| On se dit qu’on s’aime et ça raisonne… Longtemps
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| Longtemps le silence accompagne les mots dits
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| De sa muette symphonie
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| Et nous buvons le soir épicé de regrets
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| Homme, ami, frère
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| Nous sommes tous deux nourris à la même mamelle de la même nuit
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| C’est la même terre qui nous berce, la même chape qui nous oppresse
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| Le même sang que nous crachons dans nos voix
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| Le même vin que nous brûlons dans nos foies
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| Homme, ami, frère
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| Tu es beau, tu es noueux comme la vigne des crins jusqu’aux racines
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| Et ta bouche tremblante exulte quelque aveu fardé d’insultes
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| Mais déjà la vibration s’achève
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| Étouffée par le mégot à tes lèvres
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| Longtemps le silence accompagne les maudits
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| Confidences travesties
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| Et nous buvons le matin épicé de nuit blanche
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| Homme, ami, frère
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| Le soleil nous a joué un tour d’avance, il a gagné encore
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| Sa lumière nous poudre de pâleur, il nous faut rejoindre les lueurs
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| Que le monde bienveillant allume, l’enclume
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| L’enclume que le jour allume pour nous
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| Homme, ami, frère
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| Fais durer l’accolade une seconde de trop pour ce monde si prompt
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| Homme, ami, frère
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| Cette nuit était la nôtre mais le monde est aux autres et le jour nous reprend
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| Homme, ami, frère
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| La vie en vaut la peine car tu sais que je t’aime et je sais que tu m’aimes
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| Frères, je rentre chez moi, je titube un peu mais je sens dans mon dos tes yeux
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| qui me portent
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| Et dans un dernier rire
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| Sur le pas de ta porte
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| Tu persistes et tu signes
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| Ému mais digne ! |