| Les vers de terre se terrent dans les artères
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| Jamais dans l’tunnel été comme hiver
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| Ils avancent comme des automates
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| Dans une conformité triste et plate
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| Font leur job sans se poser de questions
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| Au labour ou ben au bout d’un hameçon
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| Enrichissant celui qui tient la ligne
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| Gobant toutes les conneries qu’on leur aligne
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| Et comme on s’emmerde chez les lombrics
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| Où l’ennui est devenu pathologique
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| On leur donne des bébelles, des somnifères
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| La vie en cent-quarante caractères
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| Et s’ils sont bien conscients de ce non-sens
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| Bien peu osent déroger de la cadence
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| Comme un immense ballon qui se dégonfle
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| On ne réveille pas le confort qui ronfle
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| Souvent l’amertume entre dans la danse
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| Et devant l'échec de leur existence
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| L’envie et la médisance les étranglent
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| L’angoisse leur serre le cœur comme une sangle
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| Quelques fois quand ils en ont plein leur cass'
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| Les vers de terre émergent à la surface
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| Frappés par leurs propres contradictions
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| Écœurés d’voir que le monde tourne pas rond
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| Mais faut qu’ils soient affamés en calvaire
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| Pour qu’ils se tiennent et restent solidaires
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| La plupart préfèrent sauver leur derrière
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| Plutôt que d’faire sauter la canne de verre
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| Alors cyniques ils retournent dans le noir
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| En scandant qu’ils ne veulent plus rien savoir
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| Et chacun fait sa petite calisse d’affaire
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| Au fond d’son trou avec ses oeillères
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| Les vers de terre se terrent dans les artères
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| Jamais dans l’tunnel été comme hiver
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| Trainant leurs petits malheurs en bandoulière
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| En ayant toujours peur de la lumière |