| Chaque cellule de son corps est le théâtre d’une guerre civile
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| Les années noires de son adolescence défilent
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| Regarde ta soeur comme elle grandit
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| Les murs décrépis du quartier lui parlent comme ils t’ont parlé à l'époque
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| A l’ombre de ces quelques esprits éclairés bien sûr
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| Par la lumière des commentaires déjà très anciens
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| Qui ne les prennent ni en pitié ni pour leur meilleur copain
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| Comme si le poids des confidences
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| Cela condamnait au silence puis aux mauvaises influences
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| Dieu merci, toute la chaleur que témoigne le foyer
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| Dans cette mer de béton il évitera de se noyer
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| Depuis le décès soudain de son vieux père trop vite mis en terre
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| Des suites d’une tumeur au poumon, à tellement respirer l’amiante
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| Et les vapeurs de goudron de ces rues commerçantes
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| Rebaptisées à la sueur de ses mains de prolétaire
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| Ou au volant de ces bulldozers prêts à servir le couvert
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| De ces entrepreneurs locaux qui auront toujours le dernier mot
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| Seul avec sa mère et une soeur en bas âge au quatrième étage
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| D’une tour vieille comme le monde si on en croit le décalage
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| Qu’il y a entre ce paysage ingrat et le centre-ville
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| Plutôt bourgeois et aéré, carrément tranquille
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| Le soir sous les fenêtres, dès que le ton monte
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| Il te dit avoir une revanche sur la vie
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| À qui daigne entendre ce qu’il te raconte avec cette part de récit
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| Donnant du coeur à l’ouvrage, aux pages noircies
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| De ses trop récents passages dans les parages
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| Entre nous, en 25 ans de vie de quartier
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| A côtoyer les mêmes bancs, l'été au bord de l'étang
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| Au pied des mêmes bâtiments l’hiver, toujours sans grand idylle
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| A part descendre toute la bière qu’on pourrait trouver en ville
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| Que reste-t-il ce soir? |
| A toi de voir mon frère
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| Avant de rejoindre ton pieu aux premiers coups de barre de fer
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| Parole d’un témoin oculaire fatigué dont les aveux opiniâtres
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| Ressemblent étrangement au vieux plâtre de ces murs délabrés
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| Le temps passe
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| L'étau se resserre
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| Et l’oiseau fait sa cage
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| Construit son nid de pierre
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| Le temps passe
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| L'étau se resserre
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| Quand l’oiseau fait sa cage
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| Construit son putain de nid de pierre
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| Jusqu’au jour où les pans de ces murs fissurés
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| Commencent à parler de travers
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| Trahissent ses blessures
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| Définissent les contours de son sale caractère
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| Ses cris de colère n’engagent que lui
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| Se confondent aux bruits des grincements d’un engrenage où l'échec scolaire
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| Enfante des cas sociaux, oriente leurs cas contraires
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| Vers ces filières pourries considérées comme l’aboutissement
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| D’une politique de l’emploi précaire
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| Qui a le mérite d'être claire comme la came
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| Lorsque qu’elle t’envoie au cimetière des hommes et des femmes
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| (Quand est-ce que tu vas regarder la réalité en face ?)
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| J’aimerais aller voir leurs enfants
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| A ces enculés de cols blancs
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| Se répète-t-il souvent
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| Approcher doucement de la trentaine
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| Sans grigri ni talisman dans ce désert de ciment
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| Il n’y a que chez les trous du cul
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| Que cette spirale de la honte vaut la peine d'être vécue
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| Ceux pour qui l’inculte est d’avant-garde
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| Ou le culte du grossiste, le parfait exemple de réussite
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| C’est bien triste
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| Ses yeux pleurent quand il regarde sous son sombre ciel
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| L’ombre d’une sage décision
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| Bombardée par le boucan et les odeurs de poubelle
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| J'écris son calvaire en poésie
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| Avec les mots qu’il préfère, me confie sa mère
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| Et tous les jours je prie
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| Pour peu qu’il s’en souvienne
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| Réfrène ses instincts de folie à grand peine
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| Spectateur de son propre drame
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| Avant saturé d’aigreur, vient allumer les sirènes d’alarme
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| Dès que la ville s’endort, comme par hasard
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| Au crépuscule d’une bavure ou d’un contentieux de pourritures
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| Cette atmosphère suffocante le déglingue doucement
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| Quand plus rien ne te distingue d’autrui
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| Tu t’aperçois comme ce monde est petit
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| Non seulement tu croises des seringues dans les aires de jeux
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| Mais la flemme partout dans notre système nerveux. |
| Tu me diras que
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| Toute volonté trouve son chemin si tant est qu’elle soit
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| Couronnée par un de ces plans de carrière d’ouvrier comme papa
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| Il le sait, il en souffre, putain
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| L’ingurgite trop vite sans digérer ce qu’il bouffe
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| Jusqu'à ce qu’il s'étouffe à l’agonie
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| Recrache son mal de vivre à la figure de n’importe qui
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| Les railleries des commères parleront de drogue dure (ben voyons)
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| Et les rumeurs les plus folles iront jusqu'à dire
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| Que désormais, il court derrière les pigeons
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| Dehors en caleçon, il se tape des barres de rire seul
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| Dans son bien triste délire et puis il tire la gueule
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| En se gardant de toute explication
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| Car la démence arrive
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| Par vagues successives et s’estompe
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| Bref, encore un légume de plus dans le potager
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| Pourri par le temps
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| Ecrasé par le poids de l'échec et les pierres contagieuses des murs
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| De ces putains de bâtiments |